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La vérité et la réconciliation au Canada désigne le processus continu visant à aborder les abus et les injustices subis par les peuples autochtones, notamment ceux liés au système des pensionnats autochtones, actifs du début du 19e jusqu'à la fin du 20e siècle. La vérité et la réconciliation a pour but de permettre aux peuples autochtones et au gouvernement canadien de collaborer pour établir et maintenir un cadre de vie commun fondé sur le respect, afin de favoriser des nations autochtones solides, saines et durables au sein d'un Canada uni.
Ce processus a été formalisé par la création de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR), active de 2008 à 2015. La CVR avait pour missions de documenter les abus, reconnaître officiellement les souffrances des survivants et des communautés autochtones, et de formuler des recommandations d'actions concrètes pour favoriser la réconciliation entre les peuples autochtones et le reste de la société canadienne. À la fin de cette période, la CVR a constitué un recueil de témoignages des survivants des pensionnats autochtones, publié un rapport final en plusieurs volumes résumant ses travaux, et émis des appels à l'action nationale. Parmi ces recommandations figuraient : la promotion d'une justice plus équitable et un meilleur accès aux services de santé par les peuples autochtones ; l'intégration de l'histoire des peuples autochtones et des pensionnats dans les programmes scolaires à travers le Canada ; ainsi que la protection et la promotion les langues et cultures autochtones.
Chaque année, le 30 septembre, tout le Canada célèbre la Journée Nationale de la Vérité et de la Réconciliation ainsi que la Journée du chandail orange. Cette commémoration publique honore l'histoire tragique et douloureuse des pensionnats, ainsi que les séquelles durables sur les survivants, leurs familles et leurs communautés.
C'est dans ce contexte que le Collège Nordique s'engage à œuvrer pour la vérité et la réconciliation.
Avec le déclin des langues autochtones parlées au Canada (Statistique Canada, 2021), la décolonisation et l'autochtonisation des pratiques d'enseignement des langues sont essentielles à la préservation des cultures, des langues et des visions du monde autochtone. C'est pourquoi le Collège Nordique s'est engagé à travailler avec des organisations locales, des groupes autochtones, ainsi qu'avec les gouvernements territorial et fédéral, pour rendre l'apprentissage des langues et des cultures autochtones accessibles, attrayants et pertinents pour les membres de la communauté.
Un premier pas : contribuer à la revitalisation des langues autochtones
Le Collège Nordique est situé à Yellowknife, en plein coeur des Territoires du Nord Ouest, où sont parlées neuf langues autochtones officielles : Dene kǝdǝ́, Dëne sųłıné, Dene zhatıé, nēhiyawēwin, Dinjii zhuʼ ginjik, Inuinnaqtun, Inuktitut, Inuvialuktun et Tłı̨chǫ.
Dans ses efforts pour contribuer à revitaliser les langues autochtones, le Collège propose depuis 2016 des cours en tłı̨chǫ yatıı̀, enseignés par trois professeures remarquables : Geogina Franki et Camilia Zoe Chocolate, enseignantes de tłı̨chǫ, nées à Behchokǫ̀, et Rosie Benning, enseignante de français et de tłı̨chǫ et gestionnaire de l'école de langues.
Toutefois, il était essentiel pour le Collège de collaborer plus étroitement avec les communautés autochtones, car notre ligne directrice « jamais d’eux sans eux » est au cœur de notre engagement. Ainsi, le 3 avril 2023, nous avons été très heureux de conclure une entente avec le Gouvernement Tłı̨chǫ pour l’enseignement de la langue tłı̨chǫ au sein des communautés. En réalisant cette initiative, le Gouvernement Tłı̨chǫ a permis à un plus grand nombre de personnes d’accéder aux cours de la langue autochtone, de former une instructrice, et de continuer les efforts de revitalisation des langues autochtones.
Aujourd'hui, nous pouvons dire que nos grâce à nos collaborations avec le Gouvernement Tłı̨chǫ, les Premières Nations Dénées de Yellowknife, et d'autres organisations communautaires comme le WLWB et Bushkids, ont porté leurs fruits. Notre population étudiante en langues autochtones est passée 16, lors de notre première année, à 262 pour l'année scolaire 2022-2023.
Rosie Benning, est plus que ravie de cet engouement :
« Quand je vois tout le chemin que nous avons parcouru depuis les débuts du Collège jusqu'à aujourd'hui, je suis tellement heureuse et fière de constater combien les cours de tłı̨chǫ profitent aux communautés! »
Patrick Arsenault, directeur général du Collège Nordique, est souvent interrogé sur l'importance que le collège, un établissement postsecondaire francophone, accorde à la collaboration avec les communautés autochtones :
« Je pense que c'est important pour le Collège Nordique d'agir pour la vérité et la réconciliation en mettant à profit son expérience et ses forces. En tant que minorité culturelle et linguistique, les francophones veulent mieux comprendre les réalités des peuples autochtones par l'apprentissage de leurs langues et le partage des cultures. Le Collège Nordique est fier de créer des ponts entre les francophones, les autochtones, les nouveaux arrivants et les autres membres de la communauté. »
Jody Ann Zoe, une étudiante tłı̨chǫ de Behchokǫ̀ dans les Territoires du Nord-Ouest, explique qu'elle s'est inscrite à ce cours pour pouvoir tenir une conversation avec une personne aînée :
« J'ai remarqué que, dans ma communauté, il n'y a pas beaucoup de jeunes qui savent parler la langue, alors je veux revitaliser ma langue en commençant par moi-même. »
Pour l'auteur déné tłı̨chǫ Richard Van Camp, qui a suivi le cours virtuellement, son apprentissage a profondément transformé sa famille :
« Récemment, ma mère était en ville et j'ai pu l'appeler semǫ (ma mère) pour la première fois. À 71 ans, elle m'aide à apprendre les chiffres de 1 à 10, et j'ai 51 ans. Je suis la preuve vivante qu'il n'est jamais trop tard pour apprendre sa langue et assumer la responsabilité de sa culture. Cela me rend si heureux que notre enfant, Edzazii, nous voie et nous entende pratiquer le tłı̨chǫ. »
La motivation des élèves et le succès des cours apportent un grand espoir pour la revitalisation des langues autochtones et nous encouragent à intensifier nos efforts pour poursuivre notre mission avec encore plus de détermination. C'est dans cet esprit qu'en 2024, nous avons lancé des cours d'Inuktitut.
Parce que l'apprentissage est optimal lorsqu'il sollicite tous nos sens, nos cours de langues autochtones sont soigneusement conçus pour une immersion totale dans la culture, enrichis par une diversité d'activités. En plus des cours en salle, les personnes apprenantes participent à des activités en intérieur et en plein air avec des personnes aînées dénées qui partagent leurs connaissances de la langue et de la culture.
Un second pas : contribuer à la réconciliation par le partage et l'immersion
Depuis 2019, nous avons mis en place un programme de jumelage intergénérationnel et interculturel entre la communauté étudiantes de tłı̨chǫ et les personnes aînées dénées. Ce programme a connu une croissance constante et suscite un intérêt croissant de la part de la communauté étudiante. Pour la session de printemps 2024, nous avons enregistré plus de 14 inscriptions et une participation active d'une dizaine de personnes aînées.
Cette année, des cours d'introduction au tłı̨chǫ dans la nature se déroulent au centre d'apprentissage en plein air de l'école Įtłʼǫ̀, où une approche pédagogique autochtone offre aux personnes participantes un apprentissage plus authentique. La nature devient alors à la fois un lieu d'apprentissage et une source d'enseignement, permettant aux personnes apprenantes de développer leur compréhension culturelle tout en apprenant la langue.
Durant les activités dans la nature, tels que les camps de tannage de peaux de caribou, les personnes étudiantes ont la chance de voir de leurs propres yeux la profonde connexion que les personnes aînées dénées entretiennent avec la terre. En pratiquant la langue et en écoutant les récits traditionnels, ils s'imprègnent de la vision de leur monde, et enrichissent leur compréhension culturelle.
En 2023, nous avons lancé un partenariat avec YK1 pour organiser un camp de tannage d'une semaine, combinant des ateliers de langue pour les élèves de 6e année et une exploration publique des techniques traditionnelles de préparation des peaux de caribou, élan et bœuf musqué. Cette initiative collaborative illustre notre dévouement à revitaliser la culture autochtone à travers des projets éducatifs innovants.
Les cours de langue tłı̨chǫ ne sont qu'un exemple de la façon dont le Collège Nordique acte pour la décolonisation et l’autochtonisation des pratiques d'enseignement des langues dans le Nord. Les étudiantes et étudiants qui apprennent l'anglais et le français comme langue seconde, ont également l'occasion d'en apprendre davantage sur le mode de vie des personnes aînées dénées, grâce à des activités organisées telles que la pêche sur glace, l'art de l'écaille de poisson et des ateliers sur les plantes médicinales locales.
D'autres activités en intérieur son proposées telles que l'initiation à l'art du perlage et à la couture de mocassins, et l'apprentissage par les jeux de société.
En complément, le Collège Nordique propose des cours immersifs de langue tłı̨chǫ en partenariat avec la Bibliothèque publique de Yellowknife. Ces sessions de 10 semaines sont ouvertes à tous et incluent des activités ludiques telles que des jeux de société et des séances de perlage, offrant aux personnes participantes une introduction enrichissante à la langue et à la culture tłı̨chǫ, dans un cadre amusant.
Ces initiatives enrichissent notre programme linguistique déjà riche en ressources culturelles locales, telles que le cahier de tłı̨chǫ tłı̨chǫ Yatı̀ eyıts'ǫ Dǫ Nàowoò (Benning & Franki, 2022), le cahier français Rendez-vous Nordiques : langue et culture (Garcia, 2021), et le cahier d'exercices en anglais Meet Me Up North (Galarneau & Gonzalez, 2023). Elles reflètent notre engagement continu envers la décolonisation et l'autochtonisation des pratiques d'enseignement dans le Nord, tout en contribuant à une réconciliation durable au sein de notre communauté canadienne.
Pour beaucoup, la réconciliation est une responsabilité qui doit être partagée par toutes les personnes canadiennes afin d'apprendre à vivre ensemble en harmonie.
Kim Nichols, Yellowknifer de longue date, raconte :
« J'en ai fait l'expérience en tant que personne non autochtone employée par le gouvernement territorial. Ce type de programme fait partie intégrante de l'établissement de relations au sein des communautés et d'une meilleure compréhension du contexte dans lequel nous vivons en tant que non-autochtones. L'apprentissage de la langue et de la culture nous aide à comprendre les valeurs et les besoins locaux, ainsi que les obstacles à surmonter pour répondre à ces besoins. Je pense que l'apprentissage de la langue est une étape essentielle de la réconciliation avec notre passé, non seulement pour les peuples autochtones, mais aussi en tant que Canadiennes et Canadiens responsables. »
Pour Georgina Franki, gardienne du savoir dans le cadre des cours de langues tłı̨chǫ, il est important que les membres autochtones et non-autochtones de la communauté travaillent ensemble pour que ses petits-enfants puissent grandir dans un monde où ils pourront réaliser leurs rêves, à l'abri des traumatismes intergénérationnels causés par le colonialisme. Pour y parvenir, dit-elle, nous devons nous écouter mutuellement et apprendre les uns des autres afin de nous comprendre. Il est essentiel d'acquérir une connaissance réciproque de la langue et de la culture de l'autre.
Georgina cite souvent ses aînés qui disent :
« Soyez forts comme deux personnes! »
Pour récompenser son travail, sa détermination et son engagement pour l'enseignement de la langue tłı̨chǫ, Georgina a reçu le prix d'éducatrice remarquable des TNO en 2023.