Lancement du Colloque panterritorial sur l'ÉDI : une première journée riche en échanges 

  • Événements
  • Diversité et inclusion

Comprendre et bâtir l’inclusion dans le Nord 

La première journée du Colloque panterritorial sur le leadership en équité, diversité et inclusion (ÉDI) a débuté en direct du Nunavut avec une programmation riche en échanges et en apprentissages. Dès l’ouverture, les personnes participantes ont été plongées dans une réflexion approfondie sur les réalités nordiques du leadership dans une contextualisation très concrète de l’ÉDI. 

Équité, diversité et inclusion (ÉDI) : comprendre les concepts pour mieux utiliser l’outil

La première conférence, animée par Amadou Ghouenzen Mfondi (il), coordonnateur des initiatives en équité, diversité et inclusion en immigration francophone à la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), a posé les bases du colloque en explorant les concepts-clés de l’équité, de la diversité et de l’inclusion. Il a souligné l’importance d’une compréhension juste et nuancée de ces notions pour mieux les appliquer dans les milieux professionnels et communautaires. 

« L’inclusion, c’est un environnement où toute personne peut participer et se sentir en pleine valorisation et pour ça, il faut anticiper les besoins et il faut créer un sentiment d’appartenance fort. » Amadou Ghouenzen Mfondi 

Points forts : 

Les discussions ont permis de souligner plusieurs éléments essentiels pour renforcer l’ÉDI dans les communautés francophones en situation minoritaire. Parmi les idées marquantes, il a été mis en avant que : 

  • L’ÉDI repose et doit reposer sur un cadre juridique solide, incluant la Charte des droits et libertés, la Loi sur le multiculturalisme et la Loi sur l’équité en matière d’emploi.
  • Une cohérence politique est nécessaire pour assurer une mise en œuvre efficace des principes d’inclusion.
  • L’éthique du vivre-ensemble exige une reconnaissance pleine et entière de l’humanité de chaque personne, au-delà des différences individuelles.
  • L’inclusion est un moteur d’innovation, de créativité et de productivité, permettant de bâtir des milieux plus dynamiques et résilients. 

Amadou est titulaire d’un doctorat en études de conflits. Il est chargé de cours à l’université Saint-Paul et à l’Université d’Ottawa. Ses enseignements et ses recherches portent essentiellement sur la justice sociale, les politiques de diversité et les conflits identitaires dans les sociétés multiculturelles. Dans ses activités communautaires, Amadou Ghouenzen Mfondi s’emploie à promouvoir la gouvernance et le leadership inclusifs nécessaires au vivre-ensemble harmonieux en contexte de diversité. 

Le suivre sur LinkedIn 

Être une bonne personne alliée pour les communautés inuit ou autochtone des terres sur lesquelles on vit

Ensuite, Helen Roos (elle) a abordé le rôle des personnes alliées dans le soutien aux communautés inuit et autochtone. Son expertise en développement de la main-d’œuvre nordique a permis d’éclairer les pratiques concrètes à adopter pour construire des relations respectueuses et durables. 

« Pour moi, l’alliance authentique repose sur la compréhension de l’histoire et des dynamiques de pouvoir entre Autochtones et non-Autochtones. » — Helen Roos

 Points forts :

Les échanges ont permis de mettre en lumière plusieurs éléments cruciaux pour devenir une personne alliée véritable des communautés autochtone, tout en reconnaissant les dynamiques de pouvoir et de privilège en jeu. Voici quelques concepts-clés qui ont été discutés lors de cette session : 

  • L’alliance active et le soutien concret : une personne alliée doit soutenir activement les groupes marginalisés par des actions tangibles. Cela inclut amplifier les voix autochtones et leur offrir l’espace pour diriger. Il est essentiel de reconnaître que l’alliance ne se limite pas à une posture passive, mais implique d'utiliser son privilège pour appuyer les objectifs des communautés autochtones et pour plaider pour leur représentation dans les espaces de décision.
  • Sensibilisation culturelle versus sécurité culturelle : la sensibilisation culturelle est la première étape d’apprentissage des histoires, des traditions et des impacts de la colonisation sur les peuples autochtones. Cependant, la véritable sécurité culturelle va au-delà de cette sensibilisation, en garantissant un respect actif et une valorisation des identités culturelles sans discrimination. Au Nord, cela se traduit par l’intégration des pratiques traditionnelles dans des secteurs comme la santé, l’éducation et les pratiques culturelles locales, comme la récolte, le partage de nourriture ou les journées culturelles.
  • Un engagement actif et l’équilibre des pouvoirs : l’engagement pour une alliance véritable reconnaît et corrige les déséquilibres de pouvoir en intégrant les savoirs et traditions autochtones dans les pratiques quotidiennes. La personne alliée doit s’engager de manière consciente à apprendre et à rester solidaire, même dans des moments d’inconfort. Cela passe par une compréhension critique des dynamiques de pouvoir et par la reconnaissance du privilège associé à son statut social.
  • Pouvoir et privilège : le pouvoir et le privilège liés à l'origine ou à la race offrent des avantages souvent invisibles, mais leur reconnaissance est essentielle pour comprendre les inégalités. Utiliser son privilège peut inclure la dénonciation des injustices ou le plaidoyer pour une meilleure représentation des voix autochtones. L’alliance authentique repose sur la compréhension de ces dynamiques de pouvoir et leur impact sur les structures sociales. 

Helen Roos (elle) est Présidente et principale animatrice du Centre de développement des compétences Ilinniapaa. Helen est spécialisée dans le développement de la main-d'œuvre, la recherche et la conception de programmes pour les communautés nordiques et autochtones. Forte de plus de 30 ans d'expérience dans la conception et la mise en œuvre de programmes pour les Premières Nations, les Inuits et les Métis, elle possède une expertise dans des domaines tels que l’alliance, la décolonisation et l’orientation des travailleurs. Ancienne gestionnaire fédérale du développement de la main-d'œuvre inuite et directrice du Patrimoine canadien pour le Nunavut, Helen continue de collaborer étroitement avec des clients du Nord, voyageant régulièrement pour la mise en œuvre de projets.

Tunngarniq : comment encourager et soutenir la diversité linguistique

En clôture de la journée, Stéphane Cloutier (il) a animé une discussion sur la diversité linguistique, en s’appuyant sur son parcours en promotion des langues inuit et française au Nunavut. L’importance de l’accès aux services et de la reconnaissance des langues autochtones a été au cœur des échanges. 

« Pour moi, l’anthropologie n’est pas une quête de l’autre, mais une quête de soi-même, car c’est notre identité et notre bagage qui teinte notre interprétation de l’autre. » Stéphane Cloutier

Points forts : 

  • Solutions adaptées et écoute active : Stéphane a mis en avant la nécessité de solutions linguistiques adaptées aux réalités des communautés, affirmant que « ça prend des solutions adaptées et c’est là qu’on est vraiment à l’écoute » pour répondre aux besoins spécifiques des populations locales.
  • La francophonie nordique comme tremplin : Stéphane a souligné qu’en devenant un véritable allié des communautés autochtones, il a trouvé un moyen d'intégrer la francophonie nordique dans une démarche respectueuse, permettant ainsi une meilleure intégration communautaire. Cependant, il a aussi mis en garde contre le danger d’une recherche qui devient une alliance objective déshumanisante, éloignée des besoins réels des communautés.
  • Communications inclusives : Stéphane a recommandé d’intégrer les langues autochtones, le français et l’anglais dans les communications publiques (boîtes vocales, courriels, accueil), afin de montrer une ouverture dès le premier contact et favoriser une inclusion linguistique réelle.
  • La diglossie : Stéphane a évoqué les rapports de force et les tensions entre les communautés linguistiques, en soulignant que la coexistence des langues officielles et autochtones est souvent marquée par des inégalités de statut et d'accès. Il a plaidé pour une approche plus équilibrée, où la diversité linguistique est valorisée sans hiérarchie.
  • Une véritable égalité réelle : le chemin vers une véritable égalité linguistique passe par l’écoute attentive des besoins des communautés et la mise en œuvre d’actions concrètes pour favoriser l’inclusion linguistique. « Zone d’accueil » et « être à l’écoute » sont des principes essentiels qui doivent guider l’action dans ce domaine. 

Stéphane Cloutier est originaire de l’Islet-Sud, Québec, obtient un baccalauréat en anthropologie à l’Université Laval. De 1994 à 1996, il assiste Louis-Jacques Dorais dans une étude au Nunavut et devient agent de développement communautaire pour l’Association francophone d’Iqaluit. Séduit par le territoire, il y fonde une famille. De 1996 à 1999, il collabore aux médias communautaires et aux premiers sites Web francophones des territoires. De 1999 à 2002, il contribue à des projets majeurs, dont le musée virtuel d’art inuit inauguré par Jacques Chirac. De 2004 à 2022, au sein du gouvernement du Nunavut, il œuvre à la promotion des langues inuit et française. Retraité, il dirige avec son épouse Qiliqti Inuktut, Services Linguistiques Inc., soutenant la langue inuit via des projets technologiques et promouvant le patrimoine franco-inuit en partenariat avec le Musée maritime du Québec.

La journée s’est conclue sur une note engageante, ouvrant la voie aux discussions du lendemain, qui porteront sur le leadership et la déconstruction des stéréotypes dans les territoires.